Monday, July 8, 2013

Au pays des ours



Un article qui ne plaira certainement pas à ma chère et tendre maman mais c'est bien au milieu des ours que j'ai choisi de faire mon trou. Si je me réjouis de leur présence, dire que cela ne m'effraie pas par moment serait mentir. Un ours trop curieux aura suffit à me rendre méfiant voir craintif. Ma religion me dit que de respecter les règles et respecter la nature de matière générale sera une protection suffisante et si malgré cela accident il arrive c'est qu'erreur aura été commise. 




Je pense que toute personne qui plante sa tente dans le bush y pense en s'endormant. Entre parenthèses, si habituellement m'endormir peut prendre plusieurs heures dans le bois c'est très souvent étonnement rapide : j'aurais donc enfin trouvé mon remède. Le chant des oiseaux, le bruit de la forêt sont une berceuse très efficace faisant oublier les dangers potentiels et apprécier l'instant présent. Pour autant, la 4e nuit de notre aventure je n'ai pas pu fermer l’œil de la nuit. Un mélange d’excitation et d'angoisse. Si je ne redoute pas une vilaine rencontre j'avoue souvent penser à un accident. Si cela ne me dérange que très peu personnellement (j'assume pleinement les dangers), penser à mes proches l'apprenant m’empêche de rester serein.



Si je ne suis pas armé je me sens tout comme. Sur ma ceinture sont attachés : mon spray à ours, un bear banger chargé (gros pétard),  un gros couteau (sans compter le multi-tools, le GPS et la gourde). Je n'enlève tout ça que pour dormir et le pose soigneusement à portée agrémentant mon arsenal d'une rame (mon arme favorite) pour la "nuit". Le banger et la rame vont à ma gauche, le couteau et le spray à droite. Ce rituel n'est pas celui de l'angoissé, je ne suis pas du genre à avoir des toc mais pour ces rares cas d'aventures au pays des ours je me force à garder ces manies tout comme la double vérification des poches et du contenu des sacs (si sac il y a). Tête en l'air et pantalon au mille et une poches m'obligent à cela. Bouffe, emballage, savon, dentifrice sont à proscrire.  Au réveil, juste après l'ouverture du zip du duvet on recharge la ceinture.


Que ferai-je contre un ours avec tout cet arsenal inoffensif ? Si l'ours a décidé de manger le contenu de ce petit abris en toile certainement rien mais cette probabilité reste infime, on ose y penser juste pour se faire peur. L'ours qu'on peut redouter est celui qui aura été attiré par notre bouffe. J'ai simplement quelques "outils" qui me permettent de réagir en fonction de la situation. 

J'ai une autre nouvelle manie depuis que je vis chez les ours. Celle de crier des "Yo, Bear" ou "Hi, Bear" quand je me déplace dans une végétation dense. Je peux faire  cela en plein milieu d'une conversation, que nous fassions déjà du bruit ou non, comme un reflex.

Les hivers trop longs ou les printemps trop pluvieux retardent la nourriture des ours. A cette période de l'année ils ont faim et profitent de leur odorat pour dégoter la moindre nourriture. Celle des randonneurs/campeurs, les décharges, les poubelles de villes deviennent donc d'excellents plans B pour certains.

Comme vous le savez il y a ici des ours noirs et des grizzlis. Le premier étant souvent plus petit, plus commun il n'arrive pas à la cheville des grizzlis quant à la peur qu'ils provoquent chez beaucoup de voyageurs et  meme certains locaux. Personnellement, sans grande expérience mais en ayant croisé un nombre certain maintenant, je redoute bien plus ces "petits" ours noirs. Ils sont plus fourbes, imprévisibles... beaucoup de gens d'expérience m'ont dit la même chose. 

Anecdotes oursiniennes

Un soir entendant des gros bruits non loin de nos tentedsje réveille mon partenaire en criant :
 - Sylvain y a un gros trucs dans le coins.
 - Bear Banger ?
 - Ok ?!
J'entends un petit tic tic tic, le percuteur ne fonctionne pas. Si je doute de l'efficacité de ces pétards là nous sommes certains de l'inefficacité de celui de mon partenaire. Ce cri du réveil suivi du bear banger qui ne marche reviendra souvent pour alimenter nos fou rires et restera un moment fort de cette aventure.

Un soir, la pluie commençant à tomber, nous décidons de finir notre dernier café dans la tente à Sylvain. Sous cette toile on se sent en parfaite sécurité et la sienne est une de premier choix c'est une 24 zip 4 saisons ! Si les bruits de craquement, de branches, de roche ou morceau de glace qui tombent ne nous alertent en aucun cas le grognement énorme (qu'on entendrait dans un documentaire sur les ours) non loin de notre tente nous rappelle à l'ordre. Un "oups..." me vient en tête. Je me retourne en fixant Sylvain qui me dit avec son calme et sa sérénité légendaire :  
- T'as tu bien entendu ce que j'ai entendu la ?
- Bin oui ! 'tain !
Il tire une grosse taffe sur sa cigarette et me dit :
- Ca c'est un grizzli !
- Euh ... Il est tout proche là, putain....... j'ai vraiment pas envie qu'on se fasse saccager notre bouffe ! Yooooo Bear ? Je propose coup de banger pi on sort. 

Sylvain entrouvre un zip, lâche trois ou quatre "tic tic tic", de mon coté j'ouvre pour voir ce qui se passe en rigolant encore de l'arme défectueuse de mon partenaire. J'imagine l'ours, sous cette petite pluie, en plein milieu de nul part, en train de fixer  cette étrange petite tente d'un jaune éclatant. Avant que son pétard ne se déclenche un autre grognement parvient à nos oreilles. Il y a de toute façon peu de chose à faire, mon idée peut aussi être la mauvaise... on reste finalement à siroter notre café en tendant l'oreille et espérant une nouvelle manifestation sonore pouvant nous indiquer son emplacement. Le problème dans ce genre de végétation c'est qu'un animal 4 fois plus gros que nous peut être invisible a quelques mètres. Une fois le café terminé nous sortons prêts à affronter la bête avec ma bombe au poivre si il le faut. On ne voit rien. Je lâche mon "Yo, bear" ce à quoi la bête me répond par son doux grognement témoignant tout de même d'une fort belle cage thoracique et d'une proximité certaine... Sylvain se retourne vers moi : "Mon esti d'tabarnak !! Tu es en train de parler avec un ours kawliss". Cette nuit j'ai réussi à convaincre mon collègue de monter la tente dans une cabine pour plus de sécurité.


Alors que nous nous apprêtons à lever le camp à Fort Selkirk, je vois un canot arriver, le premier qu'on croise depuis le début de notre aventure. Matthieu, un français venant de Marseille arrivé au Yukon pour faire cette aventure seul jusqu'à Circle en Alaska. Deux jours avant il s'est fait détruire un sac de bouffe et nous montre les belles entailles de griffes. Pour sa première fois ici il a du utiliser son spray à ours pour récupérer ses sacs avant de se remettre à l'eau...  Il préfère ne pas en parler à sa famille avant la fin de son aventure et il fait bien.

Notre dernier soir avant d'arriver à Dawson se passe sur un  terrain privé et habité. Je suis réveillé par des bruits de pas lourds à la course juste à coté de ma tente coté tête. Ces pas sont suivis par ceux des deux chiens qui montent la garde sur le terrain. J'ouvre vite le zip de ma tente et vois les deux chiens chassant un ours noir. Ils reviennent un petit quart d'heure plus tard venant me voir, ou plutôt sentir la tente et retournent monter la garde. Le lendemain la proprio me dit "Oh oui y a un ours noir qui traine depuis plusieurs jours, mais aucun campeur ne s'est fait mangé ici". Thanks dogs


Pierre, un autre Français arrive à Dawson quelques jours après nous. Il est de Marseille également. Je l'avais rencontré un mois plus tôt à Whitehorse. Nous plantons tous nos tentes ensemble à l'entrée du campground. En sortant de sa tente Sylvain se retrouve face à un ranger surpris prêt à faire feu. Il y a un ours qui rode dans le coin et qui vient juste de détruire les sacs de Pierre à coté. J'ai par la suite revu cet ours noir (brun) à plusieurs reprise dans les environs du campground. (Suis je le troisième marseillais sur la liste ?) Il a finalement été abattu il y a quelques jours.


L'histoire du jour à Dawson c'est un grizzli qui a tué un orignal sur le terrain de golf (pas très loin de là où je dors donc. Tout le monde ne parle que de ça on décide donc avec Cor et ses chiens d'aller faire un tour voir le piège qui a du être mis en place. Avec des chiens on trouve toujours ce qu'on veut. Me renseignant régulièrement auprès des rangers j'ai appris que lui avait été attrapé et relâché dans le bois. En espérant qu'il ne revienne pas... Les ranger ne sont jamais enchantés d'avoir à tuer un animal.

4 ours ont été abattus à Dawson cette saison sans compter la chasse

8 comments:

  1. Punaise, sérieux, Morgan, c'est flippant mais passionnant ! Fais gaffe quand même ! Et continue à nous mitrailler tout ça et nous en faire profiter !

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  2. Je mitraille autant que possible mais j'ai juste pas de connexion internet pour partager les photos. Promis ca sera fait à mon retour en ville qui sera pour je ne sais pas quand. Merci de continuer à passer par ici :)

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  3. Oui comme le dit ton copain c'est passionnant mais ça fait peur... j'ai justement regardé un reportage sur des scientifiques qui filment les ours en Alaska. C'était instructif sur le comportement qu'il faut avoir avec eux. Ne jamais les regarder dans les yeux, ne pas crier bref bien des comportements que l'on doit oublier face à eux. Conclusion : Morgan dors dans une maison!

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    1. Oui Mamannnnn....
      Je vais prendre un chien Pluto :D
      Ton premier commentaire, ça se fête !!!

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  4. En fait j'avais déjà saisi des commentaires mais je ne devais pas faire aller jusqu'au bout et ces derniers n'apparaissaient pas à présent je vais m'y mettre :)
    Oui prends un toutou mais en travaillant ce n'est pas simple, il faudra choisir le boulot en fonction du chien :)

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    1. Oui ça marche, mais le commentaire ne s'affiche qu'une fois que je l'accepte. La police ici c'est moi ! :D

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  5. Bon à mon tour... C'est la "TATA" qui va essayer de t'envoyer ce commentaire!!
    Je viens de lire ton petit "roman" sur tes aventures avec les ours et j'attends la suite.. A qui le tour ; enfin je veux dire de quel autre "bêbête" vas tu nous parler dans le prochain épisode???? Comptes-tu rester encore longtemps dans ta forêt sauvage? Enfin pas si sauvage, vu que tu y rencontres aussi d'autres "ours" de Marseille!!!

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    1. Coucou Tata :D

      Je remonte dans le temps pour raconter mes petites vacances en canot, tu trouveras ça dans les articles précédents si ce n'est pas déjà fait. La prochaine bébête pourrait bien être à plume.
      Maintenant je suis à moitié dans les bois à Dawson. C'est une énorme ville de 1000 habitants, il y a même deux épiceries ! C'est donc au milieu de cette faune que je travaille, mais je retourne de l'autre coté de la rivière dans ma tente avec des geais gris (je pense) très amicaux et quelques merles jaloux..

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