Thursday, January 10, 2013

La mountain pine beetle

Ça faisait un petit moment que je n'avais pas écrit d'article à propos de mon dieu (déesse?) : la nature. Je quitterai le temps d'un article mon cher Yukon et le grand nord en général mais resterai au Canada. Encore un phénomène qui montre comment la nature réagit face aux changements que nous lui imposons. Comment un petit coléoptère de 5mm a ravagé et continue de ravager tout un pan de l’économie de l'ouest canadien : la foresterie.


Voila donc la bête noire de l'homme vorace : la mountain pine beetle. Ce petit insecte a toujours été présent dans les forets du Mexique jusqu'au Canada et est un des nombreux agents garant de la bonne santé des forêts. Son rôle étant de s'attaquer aux pins malades, de s'en nourrir pour finalement les tuer. La mort dans la nature est toujours une bonne chose. Un arbre qui tombe donne les nutriments nécessaires pour enrichir le sol, offre un abri pour de nombreuses espèces, laisse passer la lumière pour permettre a de nouveaux végétaux de pousser pour régénérer la foret. Un arbre n'est qu'un petit maillon dans le cycle de vie de ces écosystèmes.

Pendant l’été les femelles s'envolent pour attaquer un arbre mature, c'est l'unique moment ou cet insecte vit ailleurs que sous l’écorce d'un arbre. Elles appellent les mâles grâce a leur phéromone. S'en suit une attaque massive puis la ponte des œufs, ensuite les larves dévorent l'arbre de l’intérieur. Pour rajouter au formidable de la nature, ces insectes ont développé un relation symbiotique avec un champignon que les adultes transportent. Ce champignon attaque également l'arbre en empêchant les nutriments de circuler dans la sève inhibant ainsi les systèmes de défense de l’hôte. Grâce a ce champignon les insectes peuvent digérer la lignine sans quoi ils seraient incapable de se nourrir. A la fin de l'hiver les larves se transforment en chrysalide puis en adulte en attendant de pouvoir s'attaquer à de nouveaux arbres.

Aparté monoculture :
Si le commerce des fourrures a été le premier facteur économique à motiver la colonisation, les forets canadiennes ont été surexploitées rasées d'est en ouest et du nord au sud. Il n'existe a l'heure actuelle que très peu de forets originelles et encore moins d'arbre aux dimensions record du début de l'histoire forestière canadienne. Les contraintes économiques ont fait du pin une essence d'arbre correspondant tout à fait à nos attentes et à notre impatience : il peut être récolté rapidement. Demander à un sylviculteur de planter un arbre pour qu'il soit récolté par ses petits enfants ne fait aucun sens et représente même un affront à notre supposée toute puissance. Cette monoculture va donc favoriser un petit animal qui ne se nourrit que de cet arbre. Nous lui avons offert un terrain de jeu gigantesque.


Ces coléoptères ont comme prédateurs d'autres insectes, des bactéries (qui s'occupent des œufs) et des oiseaux (comme woody woodpecker). Mais la prédation n'est pas le seul facteur limitant de l'expansion d'une espèce. Le stress hydrique est le premier facteur rendant les arbres malades facilitant ainsi l’arrivée des envahisseurs. Et je ne peux pas parler de stress hydrique sans parler de mes vénérés castors (et oui encore eux). Ils sont connus pour apporter un grand bien aux forets, leurs barrages constitue un élément essentiel pour lutter contre la sècheresse des sols. Malheureusement ils ont ete extermine et même si leur formidable capacité d'adaptation leur permet de revenir en force, les monocultures d’épineux sont toujours un frein à leur implantation (ils ont besoin de feuillus). Les feux de foret qui sont de plus en plus maitrisés étaient également un élément essentiel pour empêcher l'invasion de l'insecte. En les tuant d'une part et en permettant d'assainir la foret. Et pour finir, les grands froids hivernaux tue les larves et limite donc leur population, or cela fait des décennies que la Colombie Britannique n'a pas connu ce genre d'hiver (pour une fois je ne dis pas que c'est la faute de l'homme mais n'en pense pas moins....)

Je vous sens sceptique... "Qu'est ce qu'il vient nous parler de cet insecte ? Des arbres morts y'en a partout..." Peut être n'ai-je pas suffisamment appuyé sur l'ampleur du phénomène. Rentrons donc dans le vif du sujet, et rien de tel qu'une jolie photo. Voila donc ce que le survol de la Colombie Britannique donne :

Des arbres rouges, c'est beau n'est-ce pas ? Comme vous le savez un arbre mort de fait ne stockera plus de CO2 et sa décomposition en dégage. D’après les experts en la matière, vu l'importance des ravages ce dégagement de CO2 correspond a 5 ans de tout le secteur du transport du Canada... On peut cracher sur le Canada qui refuse de respecter le protocole branlant de Kyoto mais rien que ce phénomène les empêche clairement de respecter ces accords. Le cycle naturel étant parfait, si réchauffement climatique il y a, ça ne fera qu'avantager l'insecte lui laissant l’accès à encore plus de forets et peut être que dans quelques années on parlera de la pine beetle au Yukon.

Clique dessus pour voir l'animation
Un ami qui bosse depuis 20 ans en foresterie m'a dit : "Moé chui un gars du boé, chai rien faire d'autre, on m'a demandé de raser à blanc les iles de la cote, ensuite on m'a demande de planter des arbres et maintenant la BC au complete est morte a cause de cette bibitte tabarnak, quand je prends l’hélico ça m'arrive de brailler". Son boulot consiste à marquer les arbres infestés, les abattre et les bruler. Ce n'est pas pour sauver la foret de BC, il considère que c'est déjà trop tard. Plus les années avancent plus on l'envoie a l'est. L'Alberta est touchée également (les rocheuses les parcs de Banff et Jasper) et l'invasion progresse via la bande de pin du nord de la Saskatchewan et de la c'est une autoroute pour attaquer toute la foret boréale de l'Ontario et du Québec ce qui, selon certain, devrait arriver très prochainement.

Beaucoup disent que de toute façon seul de très gros hivers ou la disparition des forets de pins arrêterons la bestiole et moi, toujours aussi cynique, je m’émerveille devant notre impuissance. J’apprécie toujours quand l'homme avoue être incapable de faire quoi que ce soit et ceux qui espèrent sont les naïfs. La nature nous dit : "Vous voulez réguler, contrôler, maitriser avec vos petites mains et vos petits cerveaux ? Voici donc mes capacités de résilience"

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